RECLAIM YOUR MIND: un manifeste. Message urgent pour les personnes qui ont été ou risquent d'être étiquetées comme malades mentales
Anonyme
Introduction à “Reclaim Your Mind”
Nous sommes heureuseux de publier ce texte anonyme paru sur l'ancien site web de ''the 325 Collective" en 2003 puis réédité et publié en ligne en 2011. Nous ne sommes pas entièrement d'accord avec ce texte et restons pessimistes quant à la perspective d'une large «guérison» de la Terre ou des masses de la société – comme cela fut toujours le cas, les minorités se débarrasseront des chaînes des obligations sociales, prendront en main leurs propres trajectoires de vies et se définiront par elleux-mêmes, se rencontrant et créant des moments uniques de beauté, de vie et de liberté. Peut-être que sur les ruines de la société techno-industrielle de masse une guérison généralisée se produira. Pour le moment, nous visons à nous libérer des cages dans lesquelles nous sommes né·es, au côté du plus de monde possible. Cela demande de dépasser les limites contraignantes de nos schémas mentaux et de nous libérer des prophéties autoréalisatrices des diagnostics de maladies mentales, pour savourer notre singularité infinie et nos dysfonctionnements – notre refus d'être des éléments intégrés travaillant pour la mégamachine.
La brochure «Beyond Amnesty» (téléchargeable [en anglais] depuis 325.nostate.net) mérite aussi largement d'être lue, une attaque poignante et personnelle contre la psychiatrie et sa société prison qui nous conduit à l'auto-destruction. Les penseur·es anti-civilisation comme Chellis Glendinning, John Zerzan et Derrick Jensen ont retracé les origines de la pathologie de la société moderne dans la domestication, et dans les tendances croissantes au contrôle, à la répression, à la maltraitance et à l'auto-destruction. Cela demandera de rompre volontairement avec les tendances au contrôle instillées par les institutions pacificatrices de la société si nous voulons nous donner les moyens de réclamer notre autonomie délibérée et autodéterminée.
Nous avons en mémoire les suicides et les overdoses et nous considérons que ces décès sont des meurtres dus à ce système dominant. Nous menons un combat existentiel et nous avons déclaré une guerre révolutionnaire sans répit.
Dark Matter Publications, Printemps 2012.
Vendre des remèdes pour les problèmes qu'ils ont eux-mêmes créés
Il est admis que la dépression a connu une hausse constante au cours des dernières décennies. Cette hausse n'est apparemment pas prête de s'arrêter puisque l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a récemment prédit, que d'ici 2020, la dépression sera le deuxième problème de santé le plus répandu au monde, juste après les maladies cardiaques, et a expliqué que cela était dû à une précédente sous-estimation du nombre de personnes souffrant de cette «maladie».
Le sentiment croissant de vide et d'inutilité caractéristique de la dépression ne pourrait-il pas être lié à la société dans laquelle nous vivons, à une époque où les gens se perdent dans la consommation et le divertissement de masse pour éviter de penser à leur vie misérable, à leur survie économique ou à la destruction de la planète qui est en cours ? Tandis que les «expert·es» payé·es par les compagnies pharmaceutiques répondront invariablement que la dépression est une maladie cérébrale due à un «déséquilibre chimique», le résultat de quelques gènes défectueux qu'il reste encore à identifier, nous ne pouvons nous empêcher de nous demander comment il serait possible que ça ne soit pas d'ordre environnemental étant donné que la dépression n'existait pas dans les pays africains avant la colonisation?
On a largement présenté la dépression comme endémique à la génération des 20 ans et quelques. La dépression sévère est 10 fois plus fréquente aujourd'hui qu'elle ne l'était il y a 50 ans, et par rapport à la génération précédente, elle frappe en moyenne une décennie plus tôt dans la vie. De tels émotions et comportements témoignent de la frustration et du désespoir qui n'ont nulle part où aller quand le paysage social est aussi figé. Le mécontentement et même la contestation sont rapidement marchandisés en images de marque vendables ; l'aliénation comme mode. Dans le même temps, le suicide, probablement l'ultime régression, a connu une augmentation constante depuis plusieurs décennies.
- John Zerzan
Au mieux, la dépression est considérée comme un nécessaire effet secondaire du «progrès» – tout comme les meurtres civils sont des «dommages collatéraux» de la guerre – mais les «expert·es» affirment en permanence que la seule solution au problème réside dans plus de recherche scientifique. Jusqu'à ce que ces gènes mythiques aient été trouvés et que nous puissions tou·tes vivre dans le «paradis» technovirtuel promis en tant qu'êtres humain·es génétiquement modifié·es, l'industrie pharmacologique est bien sûr ravie de vendre des médicaments pour aider l'humanité à faire face à ses «déséquilibres chimiques». Tout comme on nous vend de l'eau en bouteille pour «résoudre» le problème de la pollution de l'eau.
Le meilleur des mondes ?
Malheureusement, s'ils découvrent un médicament parfait pour éliminer tous les symptômes de la dépression et du stress, ils ne s'arrêteront pas là. Comme il devient de plus en plus clair, leur intérêt n'est pas le bonheur et le bien-être de l'ensemble de l'humanité, comme ils le promettent, mais «le progrès» et la course technologiques en cours. Un tel médicament serait en réalité une occasion d'accroître les exigences de la société ainsi que le stress – et la dépression – induits par notre environnement. Notre dépendance à l'égard des substances psychoactives forcera à leur tour les autres à en utiliser pour pouvoir être concurrentiel·le et survivre.
Imaginez une société qui soumettrait les gens à des conditions qui les rendraient terriblement malheureux et malheureuses, puis leur donne les médicaments pour faire disparaître leur malheur. Science-fiction? Cela se produit déjà dans une certaine mesure dans notre propre société. Au lieu de supprimer les conditions qui rendent les gens déprimé·es, la société moderne leur donne des médicaments antidépresseurs. En effet, les antidépresseurs sont un moyen de modifier l'état interne d'un individu de manière à lui permettre de tolérer des conditions sociales qui seraient autrement intolérables.
- Theodore Kaczynski
Alors que jusqu'à récemment la société a dû s'adapter aux limites des êtres humain·es, la situation a été inversée et c'est maintenant les êtres humain·es qui doivent s'adapter à la société. Est-ce là leur conception d'un «monde parfait»? Et plus important encore, est-ce que c'est la vôtre?
Puisque cette question essentielle ne génère jamais aucun débat dans les médias traditionnels, il semble que les entreprises pharmaceutiques aient déjà répondu pour nous. Utilisant les fausses promesses de la consommation - «notre produit va résoudre tous vos problèmes et vous faire vous sentir accompli·e tout comme ces images idéalisées que vous voyez dans nos publicités» - les ventes d'antidépresseurs ont augmenté de 800% rien que dans les années 90. Ils prétendent maintenant qu'un·e américain·e sur cinq, un marché de plus de 50 millions de personnes, «a un besoin urgent de traitement». Est-ce urgent parce que les gens se réveillent enfin et qu'iels doivent être rebranché·es à la Matrice d'illusions avant qu'iels ne voient le désert qu'est le monde réel dans lequel iels vivent?
Le mythe du bonheur permanent
Un effet du marketing excessif de l'industrie pharmaceutique, et de nombreuses autres industries promouvant la «santé» comme une valeur est la création d'un idéal unique auquel tout le monde est censé·e s'accrocher. Ces consommatriceurs «pleinement accompli·es» que nous voyons dans les publicités sont devenu·es, consciemment ou inconsciemment, une sorte de modèle pour la plupart d'entre nous. Iels nous font croire que le bonheur permanent est possible, le plus grand mythe qui soit.
La souffrance est un malentendu. Ça existe. C'est réel. Je peux l'appeler un malentendu, mais je ne peux pas prétendre qu'elle n'existe pas, ou cessera un jour d'exister ... Il y a des fois je – je suis très effrayée. Tout bonheur semble banal. Et pourtant, je me demande si ce n'est pas entièrement un malentendu – cet agrippement après le bonheur, cette peur de la douleur ... Si au lieu de la craindre et de s'enfuir, on pouvait passer à travers, aller au-delà. Je ne sais pas comment le dire. Mais je crois que la réalité de la douleur n'est pas la douleur. Si vous pouvez supporter tout le chemin.
- Ursula Le Guin
Les êtres humain·es, comme tout organisme conscient, sont de nature dualiste. Nous ne pouvons pas connaître le sucré sans connaître l'aigre. Nous ne pouvons pas expérimenter le bonheur sans éprouver de tristesse. Avec notre tentative d'éliminer la tristesse, avec notre obsession pour le positivisme, nous n'avons trouvé que la mort émotionnelle. C'est comme ça que se sent une personne souffrant de dépression. En fait, on pourrait soutenir qu'une personne dépressive est différente d'une personne «normale» seulement dans sa conscience de la pauvreté de sa vie émotionnelle. Trop effrayé·es par la terreur, nous sommes devenu·es incapables de ressentir la joie. Pour pouvoir aller au-delà de cela, la douleur devrait être accueillie au même titre que les autres sentiments.
Le chagrin, la honte, la peur, la terreur et la colère sont une folie passagère.
- Benjamin Rush, père de la psychiatrie étasunienne
Les individus étiqueté·es maniaco-dépressive·ifs (bipolaires), en revanche, ressentent les deux états intensément. Tandis que la manie est acceptée et même promue par notre société (pensez aux virés shopping), les épisodes dépressifs sont mal perçus. Prenez le temps de vous demandez: cette intensité est-elle nécessairement mauvaise pour la personne ou est-ce un problème seulement parce qu'elle ne cadre pas avec le mythe du bonheur permanent promu par la société moderne? Oui, la maniaco-dépression cause de la souffrance et rend difficile de vivre une vie "normale", mais n'est-ce pas aussi un moyen de vivre plus intensément?
Normalité vs diversité
Nous constatons que, tandis que certains problèmes tels que la dépression et le stress semblent être le résultat de notre paysage mental décadent, d'autres états d'esprit sont devenus un problème uniquement parce qu'ils ne correspondent pas aux grands schémas de la civilisation, où la normalité permet de faire respecter ''l'ordre'' plus facilement. Ils utilisent les différences culturelles à des fins de marketing, mais au final tout le monde est censé·e acheter les mêmes produits et avoir les mêmes désirs: un revenu stable, une famille heureuse, une belle maison, un corps de taille parfaite, une grande confiance en soi. Celles et ceux qui peuvent se le permettre ont des «choix», mais ils sont principalement limités à des goûts différents, comme la couleur de leur voiture.
Pourtant, la diversité est essentielle pour la survie de tout écosystème. Si la nature a survécu jusqu'à notre «conquête», c'est en raison de cette diversité biologique. Si le climat ou l'environnement changeait, certaines espèces mourraient, mais d'autres survivraient, ce qui permettrait à l'évolution de continuer. Quand la civilisation aura réduit les vaches à une race "parfaite", il suffira d'un virus pour les tuer toutes.
Ce qui nous intéresse le plus, c'est la diversité parmi les êtres humain·es. Nous nous apercevons que la société ne contribue pas à cela simplement au vu du fonctionnement des écoles publiques: tou·tes les enfants doivent suivre les mêmes matières, indépendamment de leurs intérêts, et même si, à la fin de l'école obligatoire, iels peuvent «choisir» entre différentes carrières, c'est uniquement pour les besoins du marché du travail. Par conséquent beaucoup d'adolescent·es terminent l'école aliéné·es de leurs aspirations initiales et ont des difficultés à trouver un travail qui les intéresse.
Les troubles comme des différences
Intéressons-nous maintenant à d'autres «maladies mentales» répandues en partant du principe qu'elles sont davantage une différence, une partie de la diversité de tout écosystème, qu'un trouble:
Le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité (TDAH) est un exemple particulièrement triste du monde dans lequel nous vivons: beaucoup d'enfants ne peuvent pas rester toute la journée dans ces prisons appelées «écoles» parce qu'iels ont trop d'énergie et de créativité. «Préoccupé·es» par leur avenir dans cette société, influencé·es par les psychiatres, leurs parents les nourrissent de Ritaline, parfois dès l'âge de 4 ans, pour les engourdir et tuer leur flamme intérieure. Iels correspondent à nouveau à l'illusion de normalité, mais cela les rend-iels plus heureuseux?
La schizophrénie est souvent évoquée lorsque l'on parle de maladies mentales, car elle peut être profondément inquiétante et très longue. Pour comprendre cette «maladie», nous devrions jeter un œil aux cultures dites «primitives»: dans chacune d'elles, nous pouvons trouver des chamans qui avaient le don de voyager dans «l'autre monde» et de guérir les gens. L'initiation était involontaire (bien que les jeunes chamans puissent être identifié·es tôt par leurs tribus) et exigeait plusieurs années profondément troublantes avant que le chaman puisse maîtriser son savoir-faire. Ce qui est intéressant, c'est que les effets de cette initiation sont extrêmement semblables aux «symptômes» de la schizophrénie. De fait, des psychiatres occidentaux ont fait croire à certaines tribus primitives que leur futur·e chaman était «schizophrène» et devait être mis·e sous traitement. Malheureusement, il semblerait que les médicaments anti-psychotiques empêchent le processus d'aboutir, de sorte que l'individu se retrouve perdu·e dans le vide entre les deux mondes.
De plus en plus de gens sont diagnostiqué·es du syndrome d'asperger ou autisme de haut niveau. Les personnes diagnostiquées de ce «trouble» ont généralement un QI élevé et aucun autre handicap si ce n'est une difficulté à interagir et à communiquer avec les autres. Nous pensons que leur isolement et leur pensée obsessionnelle peuvent les distinguer et rendre la communication plus difficile (ou la faire perdre de son sens), car iels ne sont pas sur la même longueur d'onde que les autres. Cependant, cela ne devrait pas être forcément un inconvénient: certain·es psychiatres ont en fait récemment «rétrodiagnostiqué » Newton et Einstein avec le syndrome d'asperger. La question est la suivante : ces deux génies auraient-ils été en mesure de délivrer leur sagesse s'ils avaient été étiquetés comme autistes et médicamentés dans leur jeunesse?
L'anxiété sociale est également en hausse. Mis à part le fait qu'il soit facile de se sentir complexé·es par son comportement et son allure lorsque l'on vit dans une société qui juge tout le monde sur son apparence, il faut aussi noter que parmi tous les animaux un pourcentage d'entre eux sont naturellement timides. Les animaux timides ont de plus grandes chances de survie, car leurs craintes leur font éviter les risques. Pour les êtres humain·es, la timidité peut compliquer la participation à la société, mais c'est aussi une excellente occasion de développer des capacités intérieures dont les autres, trop occupé·es à socialiser, n'ont pas le temps de se soucier.
Ce que nous constatons, c'est que la majeure partie de la douleur ressentie par les «malades mental·es» est davantage causée par le rejet de la société que par la «maladie» elle-même. L'aliénation, la solitude, l'absence de logement, la faible estime de soi sont tous les résultats destructeurs d'une société qui ne tolère pas les différences. En outre, la croyance qu'il y a quelque chose de «mauvais» qui doit être «corrigé» (ou du moins réprimé) ne peut qu'aliéner les gens d'elleux-mêmes et les faire se sentir misérables et sans valeur. En effet, presque toutes ces «maladies» sont généralement associées à la dépression.
Notre société tend à considérer comme une «maladie» tout mode de pensée ou de comportement qui est incommode pour le système, et cela est plausible puisque lorsqu'un·e individu ne rentre pas dans le système, cela cause de la souffrance à l'individu ainsi que des problèmes pour le système. Ainsi, la manipulation d'un·e individu pour l'adapter au système est considérée comme la «guérison» d'une «maladie» et donc comme une bonne chose.
- Theodore Kaczynski
Guérison ou répression ?
Tout cela nous amène à nous demander si les psychiatres et les psychologues sont vraiment intéressé·es par la guérison ou si leur rôle est de garder une illusion "d'ordre", de "normalité" et de "santé mentale" au sein de la société? En effet, les buts premiers des asiles ont toujours été de maintenir les "folles·fous" à l'extérieur de la société parce qu'iels étaient considéré·es comme "dangereuseux". Mais en quoi sont-iels dangereuseux étant donné qu'il y a statistiquement la même quantité de criminel·les parmi les "normal·es mental·es" et parmi les «folles·fous»? C'est peut-être parce qu'iels ne s'adaptent pas à la société et que leur simple existence met en lumière les mensonges de ce système?
Fait notable, avant l'apparition des asiles, les hérétiques, les sorcières, les prostituées, les dément·es et en gros toute personne «socialement déviante» étaient "traité·es" (torturé·es, exorcisé·e, brûlé·es) par l'Inquisition et, lorsque l'Église a commencé à perdre son pouvoir, certains des chasseurs de sorcières se sont "reconvertis" à la psychiatrie et ont continué à faire le même travail en utilisant la pseudoscience plutôt que la religion pour se mettre au-dessus des possédé·es/malades mental·es et essayer de les adapter aux normes de la société. Ces normes changent énormément à travers le temps et l'espace. Par exemple, l'homosexualité était considérée comme un trouble par la bible de la psychiatrie, le DSM, jusqu'aux années 70.
Curieusement, de nombreuseux psychiatres croient aujourd'hui que les sorcières étaient "mal diagnostiquées", qu'elles "souffraient" en fait de "maladie mentale", et non de "possession démoniaque". Iels sont les seul·es à ne pas croire à la théorie du bouc émissaire (une figure sur laquelle les craintes - ou les désirs réprimés - de la société sont projetées), acceptée par tou·tes les historien·nes. Serait-ce parce que cette théorie s'applique également parfaitement aux "malades mental·es" d'aujourd'hui?
Celles et ceux qui souffrent le plus de la psychiatrie sont peut-être les enfants, qui n'ont pas le choix concernant leurs médicaments parce qu'iels ne sont pas censé·es être «responsables». Outre le TDAH et le syndrome d'Asperger mentionnés précédemment, la catégorie de «Trouble Oppositionnel avec Provocation» offre une explication pratique aux parents qui ne veulent pas comprendre pourquoi leurs enfants se rebellent contre leur idéologie oppressive et leur mode de vie consumériste et dénué de sens. Pour ces parents, les médicaments semblent être la seule «solution», surtout s'iels sont elleux-mêmes victimes de l'industrie psychiatrique.
La psychiatrie comme répression politique
Des exemples plus frappants de la façon dont le mythe de la «maladie mentale» a été utilisé par le système de répression inclus l'Union soviétique où les dissident·es politiques étaient régulièrement «diagnostiqué·es» comme «malades mental·es» et confiné·es dans des asiles. Une répression similaire a été commise aux États-Unis où les déviant·es social·es étaient enfermé·es - comme le fut Timothy Leary pour avoir préconisé l'usage de drogues «illégales». Et pas plus tard qu'en avril 2003, quelqu'un qui lisait et parlait des théories du complot au sein du gouvernement américain a été diagnostiqué «paranoïaque» et détenu dans un asile pendant 9 jours!
L'excès de passion pour la liberté a produit chez beaucoup de gens des opinions et des conduites qui ne pouvaient être supprimées par la raison et qui n'étaient pas recyclables par le gouvernement ... L'influence considérable de ces opinions sur les compréhensions, les passions et la morale de beaucoup de citoyen·nes des États-Unis, a constitué une forme de folie que je me permets de distinguer du nom d'anarchie.
- Benjamin Rush, père de la psychiatrie étasunienne
Tout comme de nouvelles lois sont constamment ajoutées pour créer de nouvelles catégories de criminel·les et contraindre les gens à une gamme toujours plus étroite de légalité, de nouveaux troubles mentaux sont "découverts" en permanence pour créer de nouvelles classes de «folles·fous», ouvrir de nouveaux marchés pour l'industrie pharmaceutique et contraindre les gens à une gamme toujours plus étroite de «santé mentale». En fait, les «symptômes» des troubles mentaux - les seules choses sur lesquelles reposent l'existence de ces «troubles» - sont si larges et répandus que n'importe qui pourrait être «diagnostiqué·e» comme souffrant de 2 ou 3 d'entre eux simplement en rendant visite à un psychiatre!
Nous avons besoin d'un programme de psychochirurgie et de contrôle politique de notre société. Le but est le contrôle physique de l'esprit. Toute personne qui s'écarte de la norme donnée pourra être mutilée chirurgicalement. L'individu peut penser que la réalité la plus importante est sa propre existence, mais ce n'est que son point de vue personnel. Cela manque de perspective historique. L'homme n'a pas le droit de développer son propre esprit. Ce genre d'orientation libérale a beaucoup d'attrait. Nous devons contrôler électriquement le cerveau. Un jour les armées et les généraux seront contrôlés par la stimulation électrique du cerveau.
- Dr. Jose Delgado
Cette citation, venant d'un psychiatre recruté par la CIA pour le programme MKULTRA de contrôle de l'esprit après avoir servi le régime fasciste en Espagne, ne pouvait pas être plus explicite. Cette obsession pour le contrôle n'est rien de nouveau pour la civilisation dominée par les hommes dans laquelle nous vivons, et le contrôle de l'esprit humain·e est sans aucun doute leur plus grand défi. Ils rêvent de tuer l'animal (la force de vie) en nous, pour finalement nous transformer en machines parfaites travaillant exclusivement au nom du «progrès». Le père fondateur de la psychiatrie américaine, Benjamin Rush, considérait même les folles·fous comme des «animaux indomptables que le psychiatre a le devoir de discipliner», une comparaison qui rappelle la manière dont les non-Blanc·hes ont été traité·es pendant la colonisation.
La réalité de la médication
La «thérapie» par électrochocs et la lobotomie ne sont pas aussi courantes qu'il y a quelques décennies, même si le simple fait que ces pratiques barbares existent encore est profondément révélateur de la société dans laquelle nous vivons. Elles ont généralement été remplacées par les médicaments obligatoires, souvent accompagnés d'une menace d'enfermement forcé si les médicaments ne sont pas pris.
Ce changement n'est pas causé par un nouveau sens de l'humanité chez les psychiatres, mais par les pressions des compagnies d'assurance qui trouvent qu'il revient moins cher de renvoyer les patient·es chez elleux avec des prescriptions de médicaments, ainsi que par les besoins d'accroissement de revenus de l'industrie pharmaceutique. Une autre cause réside dans le fait que les gens sont généralement plus enclin·es à se faire «réparé·es», mais nous ne devrions pas nécessairement voir le traitement volontaire comme un progrès vis à vis du traitement forcé. En effet, cela pourrait simplement prouver que nous avons subi un lavage du cerveau si efficace que nous ne résistons plus.
De toutes les tyrannies une tyrannie sincèrement exercée pour le bien de ses victimes est peut être la plus oppressive.
- C. S. Lewis
Jetons un oeil sur la façon dont ces médicaments sur ordonnance "fonctionnent". Alors que les publicités et les psychiatres affirment explicitement ou implicitement qu'ils aident à guérir, la réalité semble différente: ils fonctionnent en cachant simplement les «symptômes» et en maintenant le calme dans le cerveau. Une fois que les effets des médicaments sont terminés, l'individu est dans la même situation qu'avant si ce n'est pire, puisque tous les médicaments antipsychotiques peuvent endommager le cerveau après plusieurs mois ou années de «traitement», un phénomène connu sous le nom de dyskinésie tardive. Ils sont également tous fortement addictifs.
Ainsi, nous voyons que les médicaments ne font rien d'autre que de maintenir un état artificiel dans le cerveau qui rend les choses plus supportables pour l'individu. Il n'y a rien de mal à cela, si l'on considère le fait que certains troubles mentaux sont profondément perturbants et peuvent pousser au suicide, mais il est faux de dire aux gens que leurs médicaments vont les guérir. Les substances prescrites sur ordonnance, comme toutes autres substances psychoactives, devraient être utilisées aussi prudemment que possible et accompagnées d'un réel soin, assisté ou non par un·e professionnel·le. Sinon, la personne restera une consommatrice/victime de l'industrie pharmaceutique toute sa vie. Malheureusement, c'est peut-être ce qu'ils espèrent.
Guerison naturelle
Cependant, l'effet le plus problématique de ces médicaments est qu'ils empêchent souvent les individus de passer par le processus naturel de guérison qui exige un chaos dynamique avant qu'une restauration saine soit possible. La guérison réelle n'est pas un processus lent et graduel, comme les psychiatres aimeraient le croire, mais est cyclique, avec ses hauts et ses bats, jusqu'à ce que le cerveau ait été «purgé» des anciens neurones conditionnés et qu'une nouvelle liberté puisse être trouvée. Malheureusement, les gens qui travaillent dans le domaine de la santé mentale n'ont rien de chaotique, iels font tout ce qu'iels peuvent pour supprimer ces «symptômes», empêchant en même temps les patient·es d'atteindre le bout du tunnel.
Si une personne a la chance d'être «autorisée» à achever le processus de guérison, elle aboutit à une nouvelle vision de son image, de la vie, de la réalité et de la société, lui permettant d'adopter un mode de vie plus sain, sans doute éloigné de la consommation aveugle et des distractions de masse comme la télévision. Les défis et les difficultés sont des éléments nécessaires de toute croissance spirituelle et qu'est-ce qui pourrait être plus stimulant qu'une «maladie» mentale qui nous oblige à comprendre comment fonctionne notre cerveau et à faire évoluer notre conscience pour pouvoir continuer à vivre? Nos «troubles» sont vraiment des dons dangereux qui doivent être cultivés et respectés plutôt que réprimés et haïs.
Reclaiming our minds
Ne vous méprenez pas: cette longue analyse sur la civilisation et la psychiatrie n'est pas faite pour nous débarrasser de notre responsabilité, pour rejeter tous nos problèmes sur les autres. Nous sommes tou·tes bien trop impatient·es d'enfin se réapproprier nos esprits! Nous n'avons pas besoin de «professionnel·les» pour nous dire comment vivre, les gens ont découvert cela par elleux-mêmes pendant des millions d'années, et ces «expert·es» empêchent les gens de penser par elleux-mêmes, fournissant à la place des explications toutes faites pour chaque difficultés qu'iels pourraient rencontrer au cours de leur développement.
Soit vous pensez – soit d'autres doivent penser pour vous et prendre le pouvoir sur vous, pervertir et discipliner vos goûts naturels, vous civiliser et vous stériliser.
- F. Scott Fitzgerald
La victimisation conduit les gens à penser qu'iels ont absolument besoin d'avoir un·e professionnel quelconque pour les aider - praticien·ne en santé mentale, chef religieuseux, éducateurice, conseillèr·e en mode - parce qu'iles se sentent incapables de prendre leurs propres décisions ou de mener leurs propres activités. Ce n'est pas le cas! Nous sommes tou·tes capables de trouver notre chemin vers la guérison, c'est seulement la conviction que nous ne le sommes pas qui nous bloque!
Qui peut savoir mieux que nous ce qui se passe dans nos esprits? Nos craintes profondes, nos motivations, nos désirs sont généralement au-delà des mots et ils atteignent une profondeur de notre réalité que peu de psychiatre sont en mesure de découvrir, surtout pas en étant sous la pression des demandes d'"efficacité" des compagnies d'assurance. La façon dont nous pensons et voyons le monde dépend entièrement de nos expériences passées. Personne ne peut vraiment nous comprendre sans revivre toute notre vie!
L'idée n'est pas nécessairement de rejeter la psychiatrie dans son ensemble, mais de laisser les gens choisir ce qui leur paraît le mieux pour elleux, en leur montrant les différentes alternatives disponibles et en les éduquant sur les mensonges de l'industrie de la santé mentale. Plus important encore, nous ne cherchons pas une «Vérité» unique, nous voulons que chaque individu comprenne comment son esprit fonctionne, cherche ses propres solutions et ait la liberté d'adopter le moyen d'action qui lui semble être le meilleur. L'exploration de soi permet à chacun·e d'entre nous de passer du statut de victime impuissante à celui de guérisseuseur. C'est l'esprit du do-it-yourself appliqué au cerveau!
Des alternatives aux «traitements» traditionnels existent et la plupart ont existé bien avant qu'une classe professionnelle de psychiatres ait été créée. En voici des exemples: méditation, yoga, magie, auto-hypnose, traitement à base de plantes et de nutrition, thérapie cognitive, programmation neuro-linguistique (PNL). Tous sont des pièces utiles dans nos boîtes à outils. La plupart d'entre elles ont également un point de vue holistique, qui souligne l'importance du tout et l'interdépendance des parties, une idée que la plupart des psychiatres rejettent complètement!
La solution ne viendra pas du haut ou du dehors, mais du bas et du dedans. Notre inconscient veut aider notre esprit conscient à guérir, si seulement nous l'écoutons. Des changements se produisent inévitablement lorsque nous prenons enfin la responsabilité de qui nous sommes, de notre vie, de notre communauté, de notre planète, de notre avenir. Nous ne sommes plus dupé·es par le double discours de la société qui nous dit d'être des «citoyen·nes responsables» tout en nous demandant de suivre les ordres d'en haut sans les remettre en question. Nous voulons une vraie responsabilité et une vraie liberté!
Plus qu'une guérison
À ce stade, il faut clarifier quelque chose: il ne s'agit pas seulement de la guérison, parce que cette idée suppose qu'il y a un niveau à atteindre, un sentiment de bien-être éternel. Il n'y en a pas, sauf dans les contes de fées et les publicités. Rappelez-vous: le bonheur permanent c'est leur mythe! Le développement personnel (ou quel que soit le nom que vous préférez lui donner) est en fait un processus cyclique et continu où le voyage importe plus que la destination.
Pour être en mesure de voyager plus librement, il sera peut-être souhaitable de vous décharger du fardeau que représente le conditionnement psychiatrique et surtout de l'idée qu'il y a quelque chose qui cloche chez vous. Comme nous devrions le dire plus souvent: vous êtes parfait·e comme vous êtes! Vous avez fait de votre mieux en fonction de votre situation et, même si le chemin que vous avez emprunté jusqu'à maintenant a été plus difficile à suivre que d'autres, cela ne signifie pas que vous avez tout raté! Les gens «normal·es» devront aussi passer par là un jour, ou alors iels n'auront jamais la chance de grandir.
Vous êtes ce que vous croyez être. Si vous persistez à croire que vous êtes la victime impuissante d'une maladie terrible dont le salut réside entre les mains de quelques multinationales, c'est-ce que vous finirez par vivre toute votre vie. Qu'est-ce que vous souhaitez?
Ils vous ont menti, ils vous ont vendu des idées de bien et de mal, vous ont amené à vous méfier de votre corps et à avoir honte de votre prophétie du chaos, à inventer des mots de dégoût pour votre amour moléculaire, ils vous ont hypnotisé dans l'inattention, et vous ont ennuyé avec la civilisation et toutes ses émotions usuraires. Il n'y a pas de devenir, pas de révolution, pas de lutte, pas de chemin; vous êtes d'ores et déjà la·e monarque de votre propre peau - votre liberté inviolable n'attend que d'être complétée par l'amour d'autres monarques: une politique du rêve, urgente comme le bleu du ciel.
- Hakim Bey
En fonction du nombre d'années passées dans l'industrie de la santé mentale (ou sous le jugement de la société), changer cette croyance peut être difficile mais c'est possible! Prêtez attention à vos croyances dans votre vie quotidienne, jouez avec différents paradigmes (systèmes de croyance) pendant une journée, une semaine, un mois. Piratez votre tunnel de réalité et acceptez l'idée que vous n'êtes pas inférieur·e, mais simplement différent·e, que nous sommes en fait tou·tes différent·es. Si vous avez besoin d'inspiration ou si vous n'êtes pas tout à fait convaincu·e que les croyances ont un rôle à jouer, lisez quelques livres sur la liberté cognitive, la programmation neuro-linguistique ou le chaos. Il pourrait changer à jamais la façon dont vous voyez la «réalité».
Suivre son chemin
Notre esprit est auto-créé, il s'est développé au fil des ans alors que que nous rebondissions sur la «réalité» et sur d'autres êtres humain·es. Il n'existe pas de structure rigide que suivrait chaque cerveau, même si certains modèles sont utiles pour comprendre comment nous pensons. En conséquence, nous avons tou·tes des potentiels et des lacunes complètement différents. Au lieu de nous concentrer sur nos «problèmes», ne serait-il pas plus judicieux de promouvoir nos dons, nos compétences, nos désirs, nos sensibilités, afin que chacun·e de nous profite de son potentiel pendant sa durée de vie limitée, aussi éloigné·e qu'iel soit des «normes» actuelles?
Les normes sont et ont toujours été illusoires de toute façon. La physique quantique nous dit que nous sommes les co-créatriceurs de l'univers, que le seul fait d'observer un objet change sa nature et que notre esprit "subjectif" a un rôle beaucoup plus important dans la réalité que la plupart des matérialistes ne le pensent. La façon dont nous voyons la «réalité» et nous-mêmes a plus à voir avec notre environnement mental («la Matrice») qu'avec toute sorte de réalité matérialiste ou de prédispositions génétiques. Si nous sommes capables d'aller en quelque sorte au-delà des structures mentales de la civilisation, si nous sommes capables de les transcender, alors tout devient possible!
L'homme ignore la nature de son être et de ses pouvoirs propres. Même l'idée qu'il se fait de ses limites est fondée sur l'expérience du passé, et chaque pas de son progrès prolonge son empire. Il n'y a donc aucune raison d'attribuer des limites théoriques à ce qu'il peut être, ou à ce qu'il peut faire.
- Aleister Crowley
Pour suivre notre chemin, nous devons d'abord savoir ce que nous voulons. Nous devons apprendre à écouter notre voix intérieure, notre inconscient, notre véritable volonté, ce petit quelque chose à l'intérieur de chacun·e d'entre nous qui sait intuitivement quelle est la meilleure direction à prendre. Cela peut signifier s'extraire, au moins pendant un certain temps, de tout le bruit de fond de la civilisation, comme la télévision, la radio, les journaux et éventuellement les ami·es. Toutes nos peurs, désirs et idées concernant nos limitations ne disparaîtront pas à la seconde où nous nous isolerons, mais nous pourrions trouver la méditation utile pour nous aider dans ce processus.
Deux routes divergeaient dans les bois. J'ai pris la moins parcourue, et cela a fait toute la différence.
- Robert Frost
À notre connaissance, nous n'avons qu'une seule vie sur cette planète. Pourquoi devrions-nous la gaspiller en essayant de nous adapter aux attentes toujours plus exigeantes de cette société insensée quand il y a tant à vivre, à explorer, à expérimenter et à découvrir?
Les changements viennent toujours d'en bas et les vieilles structures de l'oppression vont inexorablement tomber quand nous cesserons de compter sur elles. Nous pourrons finalement créer une nouvelle culture de la diversité et de la solidarité où tout le monde est accepté·e (et aimé·e!) pour qui iel est!
La bonne nouvelle est que tout changement réalisé dans la société grâce à nos actions est susceptible d'avoir beaucoup plus d'impact sur nos vies que n'importe quels traitements réalisés seul·e chez soi! Cela ne signifie pas que nous devons créer une nouvelle classe de professionnel·les qui diront aux autres comment vivre, c'est la chose à laquelle nous nous opposons! Tout comme la position d'un·e enseignant·e par rapport à ses élèves empêche automatiquement tout enseignement de se produire, l'autorité d'une ou un guérisseur exclut toute réelle guérison. Une guérison efficace n'est pas hiérarchique, et nécessite que tous les individus guérissent et soient guéri·es en même temps.
Nous sommes resté·es seul·es pendant trop longtemps! Après trop d'années d'isolement et d'aliénation, certain·es ont abandonné l'espoir que quelqu'un les comprenne vraiment un jour (au lieu d'être simplement «compatissant·es» comme leur psychiatre - lorsqu'iels ont de la chance). Assez de désespoir, assez de division! Nous sommes ici, les «folles·fous», les «coléreuseux», les «instables», les «chaotiques», les «déprimé·es» ...
Le dicton «aucun·e d'entre nous n'est libre tant que d'autres ne le sont pas» semble plus vrai que jamais en ces temps oppressifs. Nous ne pouvons pas espérer trouver la joie et la plénitude sans changer notre environnement, sans changer les structures mêmes de la réalité. Ainsi, toute guérison réelle et profonde impliquera nécessairement une guérison de la planète et de la société dans son ensemble.
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Traduit de l'anglais. Cette traduction est participative et D.I.Y., elle n'est sans doute pas parfaite, mais toute personne peut proposer des améliorations en nous contactant (zinzinzine[at]riseup.net), cette version est donc en permanence susceptible d'être modifiée.
Source : theanarchistlibrary.org
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