Comment la réponse humaine au stress permet d'écarter la notion de "trouble bipolaire"
L'autrice, qui a reçu le diagnostic de «trouble bipolaire I», remet en question ce diagnostic en s'appuyant sur la connaissance des mécanismes physiologiques humains de réponse au stress. Elle donne en fin d'article quelques pistes pour apprendre à affronter ces réactions et regagner une certaine maîtrise face à elles.
Si l'autrice présente ici l'idée que ce que l'on appelle "trouble bipolaire" pourrait être un fonctionnement induit par le stress, cela n'est pas pour autant une nouvelle façon de tout réduire à la biologie. D'ailleurs, refuser le réductionnisme biologique ne revient pas à refuser de prendre en compte le fonctionnement de notre corps! Nos «états d'âme», aussi dépendants soient-ils de nos conditions de vie, s'imbriquent également à notre physiologie la plus élémentaire. Le modèle de stress présenté ici, loin de nous réduire à être les victimes passives de nos corps, permet au contraire de sortir de la perspective d'une pathologie innée et donc d'un certain fatalisme biologique. Enfin, ce modèle peut parfaitement être articulé avec des modèles explicatifs qui prennent en compte les facteurs sociaux, au sens large, qui peuvent mener au stress. C'est même son but.i
Sarah Knutson
Ce que nous savons aujourd'hui du modèle du stress
Pour diverses raisons complexes, certain·es d'entre nous développent une hyperactivité des mécanismes de base du stress (réponse sympathique/combat-fuite) dès le début de leur vie. Voici, brut de décoffrage, ce qu'écrit Robert Sapolsky, neurobiologiste et primatologue de renommée internationale à l'Université de Stanford:
Chez de nombreuses espèces, des facteurs de stress majeurs au début de la vie produisent des niveaux élevés de glucocorticoïdes (ainsi que de CRH et d'ACTH, les hormones hypothalamiques et hypophysaires qui régulent la libération des glucocorticoïdes) chez les enfants et les adultes et une hyperactivité du système nerveux sympathique. Les taux de bases de glucocorticoïdes sont élevés – la réponse au stress est toujours quelque peu activée – et le retour à l'état de base est retardé après un facteur de stress. Michael Meaney, de l'Université McGill, a montré comment le stress en début de vie atténue de façon permanente la capacité du cerveau à maîtriser la sécrétion de glucocorticoïdes. (Sapolsky, 2017, pp. 194-95.)1
Une façon simple de concevoir cela est d'imaginer que beaucoup d'entre nous commencent leur vie en mode "ralenti accéléré". Le moteur est toujours légèrement trop vif et tourne un peu trop vite pour son bien. De plus, il s'avère plus difficile à calmer que la moyenne. Cela augmente l'usure du système, et au fil du temps cela devient visible.
Il y a un million de façons dont les effets d'un haut régime peuvent se manifester. La réponse au stress affecte pratiquement tous les aspects du fonctionnement humain. En voici quelques-unes que Sapolsky (2004)2 aborde dans un autre livre:
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Fonctionnement des glandes, des hormones et des neurotransmetteurs
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Cœur, tension artérielle, cholestérol, respiration
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Métabolisme, appétit, digestion, fonctionnement de l'estomac et des intestins
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Croissance et développement
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Sexe et reproduction
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Système immunitaire, vulnérabilité aux maladies
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Douleur
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Mémoire
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Sommeil
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Vieillissement et mort
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Santé mentale et bien-être
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"Dépression", motivation, capacité à éprouver du plaisir
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Personnalité et tempérament
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Vulnérabilité à l'addiction
En d'autres termes, il ne se produit pratiquement rien dans l'esprit et le corps humain qui ne soit potentiellement affecté par la réponse au stress.
La façon dont la réponse au stress nous affecte individuellement est un autre sujet. Les êtres humain·es sont incroyablement divers·es dans leurs conditions de vie, leurs expériences, leurs intérêts et leurs facultés. Il n'y a pas de manuel de la vie. Il n'y a pas non plus une bonne façon de faire les choses. Le développement humain est plutôt une œuvre créative.
Chacun·e d'entre nous fabrique une réponse aux défis auxquels nous sommes confronté·es en fonction de ce avec quoi nous devons composer (personnellement, socialement, environnementalement) à ce moment-là. Avec le temps et la répétition, certaines réponses commencent à venir plus naturellement que d'autres. Elles commencent à être perçues comme l'essence de ce qui est «moi». Et, selon toute vraisemblance, ce que je mets en œuvre – et qui finit par me sembler entièrement naturel – finira par être entièrement différent de ce que vous mettez en œuvre et de ce qui finit par vous sembler naturel.
C'est la beauté et la diversité de la vie. Cela nous donne potentiellement beaucoup à apprendre les un·es des autres.
Alors, que se passe-t-il pendant la "manie"?
Eh bien, voici une information vraiment très intéressante. Il s'avère que la réponse humaine au stress (sympathique/combat-fuite) possède une véritablement duplicité. Elle joue sur les deux tableaux. En d'autres termes, la réaction de stress ne s'active pas seulement par peur, comme lorsque je suis poursuivi·e par un ours. Elle s'active aussi si je suis l'ours et que je vous poursuis. Ceci a été découvert par un groupe de chercheureuses de l'Université de Floride.(Bradley et al. 20013; Bradley et al., in press4; Lang et al. 20105; Lang et al. 20136; Schupp et al. 20047.) Voici un des diagrammes qu'iels ont dessiné pour illustrer leurs découvertes:

(Schupp et al., 2010, p. 598.)
Comme vous pouvez le constater, le côté supérieur de la réponse au stress (motivation appétive) a beaucoup de points communs avec les choses excitantes et agréables que beaucoup d'entre nous ont tendance à rechercher pendant un état dit «maniaque».
Quand on y pense, c'est logique.
La réponse humaine au stress/de survie (système nerveux sympathique/combat-fuite) s'est développée pour nous aider à survivre – à la fois en tant qu'individus et en tant qu'espèce. Notre survie ne demande pas uniquement d'échapper aux menaces aussi vite que possible. Pour survivre, nous devons également être vigilant·es et à l'affût des éventuelles opportunités.
Il ne suffit pas de savoir qu'une opportunité existe. Beaucoup d'opportunités ne se présentent que pendant un court moment. À l'image du chat avec la souris, vous devez vous préparer et la pourchasser avant qu'elle ne s'échappe.*
Pensez aux ventes flash du Black Friday. Je dois être capable de me mobiliser très rapidement lorsque je veux décrocher cette affaire du siècle pour une TV grand écran. Heureusement, la réaction de survie est là pour moi. Elle est à l’affût de tout ce qui compte le plus pour les êtres humain·es – me permettant ainsi d'éclipser la personne qui est à l’affût de la même bonne affaire que moi.
Physiologie de la "manie": symptôme par symptôme
Maintenant que nous avons un léger aperçu de ce qui se passe, jetons un coup d'œil sur ce qu'on appelle la "manie". Nous passerons en revue les critères d'un "épisode maniaque" symptôme par symptôme pour que vous puissiez voir comment la réaction au stress se manifeste potentiellement ici.
Critères du DSM 5 pour l'épisode maniaque
A) Une période nettement délimitée d'humeur anormalement élevée, expansive ou irritable et d'augmentation anormale de l'activité ou de l'énergie dirigée vers un but. Cette période doit durer au moins 1 semaine, se manifester la plus grande partie de la journée et presque tous les jours (la durée n'a pas d'importance si une hospitalisation est nécessaire).
B) Au cours de cette période de perturbation de l'humeur et d'augmentation de l'énergie ou de l'activité, 3 (ou plus) des symptômes suivants (4 si l'humeur est seulement irritable) sont présents à un niveau significatif et représentent un changement notable par rapport au comportement habituel:
1. Augmentation de l'estime de soi ou idées de grandeur.
2. Diminution du besoin de sommeil (p. ex., se sentir reposé·e après seulement 3 heures de sommeil).
3. Plus grande loquacité que d'habitude ou désir de parler constamment.
4. Fuite des idées ou vécu subjectif de pensées qui s'emballent.
5. Distractibilité rapportée ou observée (p. ex., l'attention est trop facilement attirée par des stimuli extérieurs sans importance ou insignifiants).
6. Augmentation de l'activité orientée vers un but (sociale, professionnelle, scolaire ou sexuelle) ou agitation psychomotrice (activité sans but).
7. Engagement excessif dans des activités à potentiel élevé de conséquences dommageables (p. ex., s'engager dans des achats inconsidérés, des conduites sexuelles à risques ou des investissements commerciaux déraisonnables).
Commençons par les critères A: humeur élevée, expansive ou irritable, augmentation de l'énergie et de l'activité dirigée vers un but.
Pour vraiment se rendre compte de ce qui se passe, revenons à cette affaire du siècle et jetons un coup d’œil à ce qui se passe physiquement et mentalement:
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Tout d'abord, une telle occasion ne se présente pas tous les jours.
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Selon toute vraisemblance, je vais obtenir quelque chose dont j'ai désespérément envie à un prix qui m'est enfin accessible.
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Mais il y a un piège: j'obtiens cette affaire si et seulement si l'article que je veux est toujours en rayon – ce qui m'oblige à m'activer comme un·e dingue pour devancer les autres.
Donc, mon humeur est-elle expansive ou élevée...? Bien sûr que oui. C'est la chance de l'année, et je la décrocherai peut-être.
Est-ce que je vais potentiellement être irritée...? Si quelque chose me coupe la route ou se met sur mon chemin, sans aucun doute.
Mon énergie est-elle augmentée...? Bien sûr que oui. Je dois me précipiter pour y aller.
Suis-je orienté vers un but... ? Pardi. C'est l'idée.
Est-ce que ça dure une semaine...? Probablement pas, parce que c'est la vente flash du jour.
Mais ça pourrait. Par exemple, si je devais rivaliser avec d'autres participant·es dans un jeu télé pour obtenir la meilleure affaire – et que cette compétition durait une semaine ou un mois... Eh bien, si je désirais vraiment, vraiment cet article, et que c'était ma seule chance, je pourrais bien rester survoltée aussi longtemps qu'il me faudrait pour avoir toutes les chances d'obtenir le prix. De la même façon, si j'étais dans une zone de guerre et que je devais rester en état d'alerte, mon corps tenterait de se montrer à la hauteur de la situation aussi longtemps que j'en aurais besoin afin de protéger du mieux que possible mes intérêts.
Passons aux critères B. Ici, il est d'abord nécessaire de comprendre un peu mieux la réponse combat-fuite et la façon dont elle nous affecte réellement. Quand je suis à la poursuite de la chance de ma vie, voici ce qui se passe dans mon corps:
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Il y a une poussée d'adrénaline. Mon cœur et mes poumons battent la chamade et ma tension artérielle augmente. Tout cela dans le but d'apporter autant de carburant et d'oxygène que possible à mes muscles.
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Mes poils se dressent, mes poings se serrent, mes jambes se préparent à courir. Tout est prêt pour bondir d'un instant à l'autre.
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Ma digestion s'arrête. J'ai mal à l'estomac et j'ai mal au ventre. Ma vessie et mes intestins se vident – histoire de s'assurer qu'il n'y a pas de surplus inutile qui me retient.
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Les facultés supérieures de la pensée (jugement) sont suspendues. Elles prennent de l’énergie dont mes muscles ont besoin pour me mouvoir. Elles prennent aussi beeeeaucoup trop de temps. C'est le moment d'agir! Je ne peux pas me permettre de m'embarrasser de détails. Une fois que l'affaire est dans le sac, j'aurais le temps d'évaluer avec plus d'attention et de réflexion les différentes possibilités.
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Débarrassé·e du jugement, les réflexes rapides et les vieilles habitudes ont le champ libre. Le système autonome prend le contrôle en coulisses et se met à mener le jeu. Ce que je fais le mieux et ce que je connais le mieux – ce qui me vient le plus naturellement – sera ce avec quoi ce système fonctionnera. Après tout, les enjeux sont élevés. C'est la Coupe du monde de ma vie. Je ne vais pas tester un·e nouvel·le attaquant·e ou un nouveau type de jeu. Je ne vais pas non plus faire entrer les remplaçant·es. Hors de question! Dans cet état d'esprit, c'est ce que j'ai déjà fait des millions de fois qui va être fait à nouveau.
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Ensuite les champs de vision et d'ouïe sont rétrécis pour éviter toutes distractions extérieures. L'attention se fixe. Cela me permet d'être hyperfocalisé·e et de zoomer entièrement sur ce que je veux qu'il se passe.
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Je ne ressens pas la douleur. Littéralement. Les endorphines, les opioïdes naturels de mon corps, fonctionnent maintenant à plein régime, en faisant en sorte encore une fois que rien ne me distraie de la tâche à accomplir.
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Et il y a encore mieux. Le fait que je poursuive un objectif personnel très significatif provoque des doses massives de dopamine – qui est essentiellement de la cocaïne endogène. En d'autres termes, le système de récompense de mon corps m'encourage et me renforce afin de poursuivre de tout cœur quelque chose de très important pour moi.
Ok, revenons maintenant aux critères B.
1. Augmentation de l'estime de soi ou idées de grandeur. Est-ce qu'ici je me sens plutôt puissant·e? Bien sûr que oui. L'opportunité de toute une vie est à portée de main. Mes muscles sont gonflés. Je ne ressens aucune douleur. J'obtiens d'énormes récompenses internes. La cocaïne endogène me dit que je vais super bien. Toute information extérieure qui pourrait me décourager est écartée. Ouais, cet état est plutôt génial. Et si je n'étais pas moi-même génial·e, pourquoi me sentirais-je comme ça?
2. Diminution du besoin de sommeil. Soyons honnêtes. Y a-t-il la moindre chance que mon corps me laisse dormir étant donné les circonstances...?
3. Plus grande loquacité que d'habitude ou désir de parler constamment. Ouais, c'est sûr. Si je tiens à toi ou si tu tiens à moi, bien sûr que je vais parler. C'est l'opportunité d'une vie. Je veux que vous soyez au courant. Je veux que vous y participiez. Je veux votre soutien à 100%. C'est beaucoup, beaucoup, trop précieux pour que l'un·e d'entre nous passe à côté. Et je vais m'assurer que vous le sachiez. Je vais aussi m'assurer que vous disposez de toute l'information nécessaire pour mener à bien ce plan. Vous pouvez même continuer sans moi si jamais je tombe en chemin.
4. Fuite des idées, pensées qui s'emballent. Évidemment. Il y a tant de choses à décider et tant d'angles à prévoir. Toutes les possibilités doivent être envisagées. Toutes les vulnérabilités doivent être anticipées et traitées.
5. Distractabilité. Franchement, il se pourrait que je ne me sente plus jamais aussi bien. J'ai le vent en poupe et je ferais bien de profiter de cette énergie tant qu'elle est là. Il n'y a pas un moment à perdre. Je dois m'assurer d'obtenir tout ce que je peux obtenir tant que l'univers est aussi généreux envers moi et me fait me sentir aussi merveilleusement bien. Oui, je sais que vous pensez avoir des choses importantes à me dire. Mais ça peut attendre. On peut parler n'importe quand. Vous ne vous rendez pas compte. C'est une occasion unique dans une vie.
6. Activité orientée vers un but, agitation psychomotrice. Ouaip. C'est bien présent, c'est sûr, comme nous en avons parlé plus haut, pour toutes les raisons ci-dessus.
7. Activités à risques, haut potentiel de conséquences dommageables (achats inconsidérés, conduites sexuelles à risques ou investissements financiers insensés). Exactement. C'est là que la réaction de survie est vraiment dangereuse.
En résumé, tout l'objectif de la réaction de survie est de faciliter une action immédiate et une résolution rapide. Donc, cela m'envoie le message, en gros, que tout est urgent et qu'il faut courir, courir, courir. Parce qu'après tout, c'est la chance de ma vie. Alors assure, tout de suite. Une fois que nous l'aurons saisie, nous aurons tout le temps de réfléchir à ce que nous avons fait, comment nous l'avons fait et comment nous pourrions faire mieux la prochaine fois. Mais, dit mon cerveau dans l'état d'esprit de survie, ce n'est pas le moment.
Dans ces circonstances, mon jugement éclairé n'a aucune chance. Il est privé de ressources, alors même que mon corps est orienté vers l'action et que mes vieilles habitudes règnent en maître. Il y a également très peu de chance que la moindre information extérieure passe le pare-feu contrôlé par un système de champs de vision/d’ouïe hautement rétréci et hyperfocalisé qui tient à s'assurer que 100% de mon attention est concentrée sur la poursuite de cette récompense.
C'est à peu près tout. Nous avons fait le tour de tous les symptômes de la "manie" soi-disant génétique, issue d'un déséquilibre neurochimique, armé·es seulement de la bonne vielle et ordinaire réponse humaine au stress qui se produit chez des millions de gens à chaque fête de fin d'année.
Si vous m'avez suivi jusqu'à présent et que cela résonne avec votre propre expérience, il est fort possible que vous commenciez à voir comment tous les éléments sont réunis pour créer la "tempête" que l'on appelle "épisode maniaque".
Mais qu'en est-il de cet effondrement inévitable qui survient après la soi-disant "manie"? D'où est-ce que ça vient?
C'est très simple. La réaction de survie agit sur un temps et une énergie empruntés ailleurs. Elle exige des sacrifices de toutes sortes d'autres systèmes corporels. Sur le moment, je ne m'en rends pas compte. L'adrénaline, la montée d'énergie, les pics de dopamine, l'insensibilité à la douleur, l'état d'esprit hyper-focalisé, tout converge pour me permettre de poursuivre des avantages à court terme.
Mais quand je reviens sur terre, c'est l'heure de payer ses dettes. Il y a un énorme travail à faire pour ravitailler, réapprovisionner et réparer les dommages – au moins dans mon propre corps et probablement aussi dans ma vie.
Parlons biomarqueurs
Si tout se passe bien, vous pouvez maintenant concevoir comment la plupart – si ce n'est la totalité – des symptômes dits " bipolaires " sont liés à la réaction au stress (réaction de survie) de l'être humain·e. La bonne nouvelle, c'est qu'il existe un moyen de tester si c'est bien cela qui est en train de se passer. Il existe de nombreux biomarqueurs pour ce type d'état de stress: tension artérielle, taux de glycémie et d'oxygène, tests sanguins et salivaires pour les hormones (adrénaline, glucocorticoïdes), tests de conductivité cutanée, tension ou contractions musculaires, fréquence des mouvements, s'il y a une prévalence entre la motricité fine ou globale, dilatation des pupilles, si la perception visuelle est orientée vers les détails ou vers une vue d'ensemble, scanners du cerveau pour déterminer quelles voies neurales sont activées ou pas... et je pourrais continuer.
Qu'en est-il des autres troubles du DSM...?
Oui, ils possèdent tous des corrélats potentiels avec à la réponse au stress, présentant des symptômes qui correspondent également à des "marqueurs de stress" connus. Ce n'est qu'une question de temps avant que nous commencions à les identifier et à mener les recherches scientifiques réelles/honnêtes que tant d'entre nous réclament depuis toujours.
Restez à l'écoute – nous démystifierons certains de ces autres "troubles" en partant du point de vue de la réaction au stress dans un futur proche.
Pourquoi c'est important
Supposons que vous me disiez que les catastrophes que je provoque en état "bipolaire" sont dues à une condition génétique ou pathologique qui rend mon cerveau structurellement déficient. Si c'est le cas, alors tout espoir de traitement efficace dépend logiquement des scientifiques spécialistes du cerveau, des médecins et des chirurgien·nes. Mon rôle principal consiste à prier pour qu'iels trouvent un remède et vite.
En revanche, supposons que le problème ne vienne pas du tout de ça. Supposons que ce qui motive vraiment ma soi-disant "manie", c'est que ma réaction de stress/survie se déclenche violemment.
Alors la solution est beaucoup plus à ma portée, sur un terrain accessible à mon action. Bien sûr, j'ai des choses à apprendre. J'ai besoin de comprendre les bases du fonctionnement du système de survie. J'ai besoin d'apprendre ce qui l'active et, plus important encore, ce qui le désactive.
Mais si j’acquiers ces connaissances de base (qui peuvent en moyenne être enseignées en quelques heures), il y a alors énormément de choses sur lesquelles je peux travailler à travers mes propres observations et tâtonnements.
Agir sur la "manie"
Voici quelques principes de bases qui m'ont été utiles.
Qu'est ce qui m'active?
La réaction de survie s'active face à la peur. La peur ressentie par le/la prédatrice et la peur ressentie par la proie sont légèrement différentes. Les prédateur·ices ont peur de rater des opportunités. Les proies ont peur de devenir cette opportunité. Mais la peur reste le principal déclencheur qui active le système.
Qu'est-ce qui me désactive?
Je pensais qu'il n'existait avait aucun moyen d'arrêter ce truc. Ça fait partie de moi – et dirige fondamentalement ma vie – depuis aussi longtemps que je m'en souvienne. Je n'imaginais pas comment je pourrais agir là-dessus. J'avais essayé tellement de choses, aucune d'entre elles ne semblait vraiment fonctionner. Les médicaments m’assommaient, mais tuaient par la même occasion tout ce que j'aimais chez moi. Je me sentais coincée.
Les choses ont commencé à changer lorsque je me suis mise à voir mon corps comme mon allié, plutôt que mon ennemi.
Le fait est que mon corps déteste tout simplement être en mode survie. Le système de survie consomme de l'énergie et des ressources comme si je pouvais me permettre de tout liquider. Ce n'est tout simplement pas un fonctionnement durable.
Il y a 300 billions de cellules dans le corps humain. La réaction de survie en sature quelques-unes, mais laisse la grande majorité d'entre elles au régime sec. Pour la majorité des cellules, vivre en mode survie est plutôt lugubre. Leurs besoins sont largement ignorés et restent ainsi non-satisfaits tant que le système de survie est en marche. Elles n'apprécient pas du tout. Rien ne les rendrait plus heureuses que de sortir du mode survie et de revenir à l'autre option (heureuse, durable, détendue) que chaque corps humain a à offrir.
Cette autre option est le mode repos et régénération du système nerveux parasympathique. On n'entend pas beaucoup parler de ce système. Il est considéré comme ennuyeux, comparé au mode combat-fuite. Il a essentiellement une fonction de réparation et d'entretien.
Mais, quand on y pense, il y a beaucoup de potentiel et de sagesse à tirer de ce système réparateur de l'organisme. C'est ce qui nous permet de digérer la nourriture, de maintenir un rythme cardiaque régulier, de ne pas oublier de respirer, de reconstituer nos ressources et de dormir la nuit. C'est ce qui nous permet de grandir, de guérir les blessures, de nous défendre contre les infections, de nous reproduire, de nous aimer et de nous connecter avec nous-mêmes, avec les autres, voire au-delà.
Mieux encore, cette partie de nous réparatrice (parasympathique) nous accompagne depuis l'utérus. Ce système connaît nos besoins et sait mieux que quiconque comment y répondre. Aucune cellule du corps n'est à plus de cinq cellules du réseau capillaire qu'il gère. Il fait littéralement de la chirurgie cérébrale sur nous tous les soirs pendant que nous dormons pour guérir les dommages de la journée.
Pour le dire autrement: la personne soi-disant la "plus bête" du monde possède un système nerveux parasympathique qui est plus intelligent que n'importe quel·le neuroscientifique qui ait jamais vécu. Si ce n'était pas le cas, aucun de nous ne serait encore en vie actuellement.
Éteindre la "manie"
Pour fonctionner dans ce monde, mon corps me donne fondamentalement deux possibilités:
1. Une réaction de survie (de stress) qui me stimule et me permet de courir et de poursuivre un objectif.
2. Un système réparateur (parasympathique) qui offre moins d'excitation, mais une réelle possibilité de sérénité et de fonctionnement durable (bien-être).
Personnellement, voici ce que je crois: je dois décider avec quelle équipe je veux jouer le match.
Pour moi, cela signifie choisir activement avec quel système corporel je veux vivre et me relier à la vie en tant qu'être humaine. Un corps fait de confiance et de liens – durable, réparateur et source de bien-être? Ou bien un corps fait d'excitation, d'ambition et d'opportunités à saisir?**
La moitié du chemin consiste à entraîner mon esprit à aller vers le corps fait de confiance et de liens. Voici quelques autres conseils qui m'ont été utiles:
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Le système de survie (de stress) persiste pour une raison. Il me signale que quelque chose qui me tient à cœur semble dangereux ou menacé. Une fois que ce risque a été traité, le système n'a plus aucune raison de rester actif. Il s'éteint naturellement dès que je commence à me sentir en sécurité. Par conséquent, j'aborde généralement son activation dans l'optique de rétablir mon sentiment de sécurité et de bien-être. Je me demande de quoi j'ai peur et j'essaie d'écouter avec honnêteté la réponse. Parfois, le simple fait de faire tout cela – admettre honnêtement que j'ai peur de quelque chose et faire face à la réalité de ce que c'est – peut beaucoup m'aider.
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Il y a un petit truc pour établir un contact conscient avec le corps du bien-être (système réparateur). Je ne peux pas accéder à cette partie de moi en essayant de toutes mes forces ou en m'obligeant à ressentir quelque chose. Plus j'essaie, plus mon système de survie (de stress) s'accélère. Le système réparateur (de bien-être) s'enclenche lorsque je prends la décision de lâcher prise et de m'autoriser à recevoir de l'aide. Je passe consciemment de l'objectif d'essayer de le régler les choses à celui de cultiver activement ma capacité à faire confiance et à être soutenue. Cela correspond à la sagesse de nombreuses religions (ainsi qu'aux programmes en Douze Étapes). Je crois personnellement que ce n'est pas par accident, mais je développerai ça une autre fois.
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En tant que personne qui a une tonne de traumatismes sociaux et qui a toujours eu une très mauvaise relation avec son corps par le passé, faire ce changement n'a pas été chose facile. Néanmoins, j'ai découvert qu'avec de la pratique c'était possible. Avec le temps, le moteur interne a commencé à ralentir. Tout n'est plus une crise permanente. Il n'est pas toujours nécessaire de régler les choses tout de suite – parfois même pas du tout! J'ai maintenant accès à un état d'esprit où j'accepte que les choses soient comme elles sont.
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En essayant de réduire le temps que je passe en réactivité de survie, j'apprends à reconnaître les signes d'escalade. Je peux alors utiliser ce "biofeedback" comme un signal de pleine conscience qui m'incite à retourner au corps de bien-être. Une fois de retour dans cet état de bien-être relatif, je peux commencer à m'enquérir en douceur de ce qui me fait peur et permettre à des possibilités de résolution d'émerger.
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En bref, il y a des millions de façons d'avoir peur, mais aussi des millions de ressources qui permettent de se sentir plus en sécurité. Il y a aussi un million de possibilités de trouver quelque chose ou quelqu'un·e en qui je peux potentiellement avoir confiance. C'est là que la diversité de la vie et de l'expérience sur la planète terre est un énorme atout.
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Cela peut également aider de faire des choses qui rassurent physiquement mon corps et mes cellules sur le fait que nous ne sommes pas en crise. J'essaie de trouver des façons d'être avec moi-même qui sont totalement différentes de la façon dont mon corps agirait si je fuyais un ours. Cela inclut bouger lentement et intentionnellement, activer ma curiosité pour des petites choses, faire des choses qui nécessitent une coordination motrice fine au lieu de grands groupes musculaires, faire des petits mouvements de toucher avec un doigt à la fois, agiter mes orteils un à un, faire quelque chose de familier et facile comme faire de la vaisselle, jouer de la guitare... les possibilités sont infinies.
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C'est important d'être patient·e. Comme le souligne Sapolsky, la transition entre l'activation de survie (sympathique) et le bien-être réparateur (parasympathique) est délicate. C'est mauvais pour le corps d'avoir les deux systèmes qui fonctionnent en même temps (presque autant qu'une crise cardiaque). De plus, il faut un certain temps pour éliminer une série d'hormones de la circulation sanguine et en introduire de nouvelles. Ainsi, le corps a besoin de temps pour faire une transition en toute sécurité. Cela prend un certain moment – un minimum de 10 à 20 minutes, et plus probablement une heure ou deux. Parfois, je m’aperçois même que cela a lieu lentement pendant plusieurs jours lorsque que je sors d'une véritable cuite émotionnelle.
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Attendre que cette transition passe peut être très inconfortable. Plus je suis activée, plus il m'est généralement difficile de rester tranquille. Mais si je suis capable de garder confiance dans le processus (au lieu de paniquer et de me replonger dans la réactivité au stress), les sensations dans mon corps deviennent progressivement plus confortables. Mes muscles se détendent lorsque mes systèmes cardiovasculaire et endocrinien cessent de les injecter et de les préparer à agir. Le système circulatoire commence à réacheminer l'oxygène et le glucose vers mon estomac, mes intestins, mon pancréas, mes reins et mon cortex préfrontal. Les nausées, l'insatiabilité et l'inconfort intestinal se dissipent à mesure que mon système digestif redémarre dans un contexte de calme relatif. Les capacités rationnelles reviennent et le jugement et la vision d'ensemble s'améliorent radicalement à mesure que mon cerveau retrouve progressivement de quoi fonctionner. Le résultat final est que je suis progressivement intéressée par – et capable d'apprécier – le repos, la relaxation, le sommeil, l'alimentation saine, les loisirs, ainsi que les interactions sociales ordinaires et les activités de gestion du quotidien. Mon corps se répare et se restaure.
À terme, je me sens à nouveau humaine.
Ci-dessous sont présentées quelques étapes que j'utilise pour m'aider à faire la transition [en anglais]. Je les pratique quotidiennement, souvent en réglant une minuterie et en les intégrant à une pratique de méditation (1-2 minute par étapes, par ex.).***

Il se trouve que ça fonctionne vraiment, lorsque l'on est prêt·e à essayer.
Notes:
1 Sapolsky, R. (2017). Behave: the biology of humans at our best and worst. New York : Penguin Press, https://www.goodreads.com/topic/show/19107284-d0wnload-behave-pdf-audiobook-by-robert-m-sapolsky (pages 194-95).
2 Sapolsky, R. (2004). Why Zebras Don’t Get Ulcers, 3rd Edition (New York: Holt Paperbacks), https://www.mta.ca/pshl/docs/zebras.pdf.
3 Bradley, M. M., Codispoti, M., Cuthbert, B. N., & Lang, P. J. (2001). Emotion and motivation I: Defensive and appetitive reactions in picture processing. Emotion, 1(3), 276-298. https://pdfs.semanticscholar.org/cd1a/a512069ea32d00bba9e2d9e62f172304652f.pdf.
4 Bradley, M. M. & Lang, P. J. (in press). Motivation and emotion. In J.T. Cacioppo, L. G. Tassinary, and G. Berntson (Eds.), Handbook of Psychophysiology (2rd Edition). New York: Cambridge University Press, http://brain-mind.med.uoc.gr/sites/default/files/aaaaEmotion_0.pdf
5 Lang, P. J., & Bradley, M. M. (2010). Emotion and the motivational brain. Biological Psychology, 84(3), 437–450. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3612949/pdf/nihms-164194.pdf
6 Lang, P. J., & Bradley, M. M. (2013). Appetitive and Defensive Motivation: Goal-Directed or Goal-Determined? Emotion Review : Journal of the International Society for Research on Emotion, 5(3), 230–234. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3784012/pdf/nihms452994.pdf
7 Schupp, H., Cuthbert, B., et al. (2004). Brain processes in emotional perception: Motivated attention, Cognition and Emotion, 18:5, 593-611,
http://wwwtest.kch.uiuc.edu/Research/Labs/neurocognitive-kinesiology/files/Articles/Brain_processes_in_emotional_perception_Motivated_attention.pdf
iNote de Zzz: L'autrice écrit en commentaire de son blog: «Vu la façon dont cet essai est écrit, cela peut donner l'impression que je ne m'intéresse qu'à la biologie. En fait, rien n'est plus faux. Le modèle du stress proposé ici n'est pas conçu comme une théorie autonome. Il se veut un complément à des paradigmes tenant compte de la culture, de la justice sociale et des traumatismes, comme le modèle du Power Threat Meaning (Johnstone et coll. 2018), le modèle de justice sociale et des besoins humains fondamentaux (Knutson, 2016) et celui de l'Intentional Peer Support (Mead 2008). J'ai travaillé sur un modèle de justice sociale et des besoins humains fondamentaux au cours des six dernières années. Ma prémisse est que le bien-être mental est inextricablement lié à la peur et à l'insécurité liées aux besoins humains, au pouvoir, aux privilèges, aux hypothèses culturelles dominantes et aux considérations de justice sociale. (...) Les travaux de Johnstone et al. établissant fermement la relation entre le bien-être mental et les considérations de pouvoir, de menace, de sens et de justice sociale, j'ai alors été libre de me concentrer sur le seul aspect de mon modèle que ces travaux n'ont pas abordé – à savoir: comment les réactions physiologiques normales agissant dans le corps et l'esprit humains sont compatibles avec – et même appuient – (ces) travaux».
* Note de Zzz: Cette perspective, l'état "maniaque" comme mécanisme de survie pour éviter de laisser échapper une opportunité, ou permettre d'échapper à un danger, résonne étroitement avec ma propre expérience de la "manie", ou celles de certainEs de mes camarades. En effet, j'ai souvent ressenti que mes états "maniaques" étaient comme si, en gros, mon organisme avait enclenché le "mode turbo". Bien sûr, c'est loin d'être sans risque. Les conséquences sont parfois désastreuses et souvent dangereuses, mais quelques fois elles sont aussi incroyablement inespérées. En tout cas, c'est lorsque je me sens dépassée par les évènements, ensevelie sous des difficultés sans issue, ou quand je suis à la poursuite d'un objectif qui me tient particulièrement à cœur, en bref, quand je ressens la nécessité de me surpasser, que cette sorte de "super pouvoir en carton" s'enclenche chez moi. Quoi qu'il en soit, il y a vraiment de quoi espérer qu'on arrive un jour non seulement à déstigmatiser ces états, mais surtout à accompagner et apprendre aux gens à les dompter, à avoir un pouvoir sur eux en étant en mesure aussi bien de les limiter, voire de les empêcher totalement lorsque c'est nécessaire, que de pouvoir s'y laisser aller lorsque les conditions s'y prêtent, plutôt que de rester obstinément avec pour unique perspective de les éradiquer à tout prix avec des traitements lourds à vie.
** Note de Zinzin Zine: l'idée qu'il s'agirait d'une simple question de choix est très glissante, car ce n'est pas parce qu'un certain degré de choix existe, que c'est forcément facile, ou possible pour tout le monde! Hors contexte, ce genre d'affirmation pourrait être utilisée pour exercer des injonctions validistes sur des personnes en détresse, en niant leurs difficultés et leur besoin d'aide. Avec des phrases du type: "si tu veux, tu peux, c'est de ta faute si tu ne t'en sors pas". Ceci dit, sortir de l'impuissance et du fatalisme en redonnant aux personnes concernées des moyens d'action, même modestes, sur leurs états "maniaques" reste un objectif particulièrement important. D'autant qu'il semble véritablement possible, dans certaines limites, d'apprendre à mieux maîtriser nos réactions au stress. Encore faut-il ne pas oublier que ça demandera certainement d'avoir du temps, de l'argent, de l’énergie, un soutien extérieur, ou tout simplement de ne pas être véritablement en situation de danger quasi permanent, or c'est loin d'être le cas pour tout le monde. Donc en résumé: oui aux outils qui redonnent un pouvoir d'action et d’auto-détermination, mais non aux culpabilisations validistes!
*** Note de Zinzin Zine: les conseils donnés par l'autrice dans cette dernière partie, surtout les étapes de sa pratique méditative quotidienne restent éminemment personnels et subjectifs, bien plus que le reste de son article. Pour ma part, certains sont très loin de correspondre à ce que j'aurais besoin de mettre en place pour me calmer et je pense que je ne serai pas la seule à ne pas m'y retrouver! Il serait donc préférable d'aborder ce schéma comme un simple exemple parmi beaucoup d'autres possibles, de ce à quoi pourrait ressembler ce genre d'exercice, tout en l'adaptant librement à nos propres besoins et préférences. Et bien sûr, il est aussi possible qu'aucun des outils proposés par l'autrice ne vous conviennent, même de très loin. Dans tous les cas, ce qui paraît assez certain, c'est que le simple fait de comprendre un peu mieux pourquoi ces états arrivent et comment ils fonctionnent est en soi une façon de regagner du pouvoir sur ces situations. Même lorsqu'on n'a pas (encore) trouver des outils très concrets pour faire face, une situation est presque toujours moins angoissante lorsqu'on comprend un minimum ce qui se passe et pourquoi.
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Source: Peerly Human (le blog de l'autrice) et republié sur Mad in America
Traduit de l'anglais. Cette traduction est participative et D.I.Y., toute personne peut proposer des améliorations, cette version est donc susceptible d'être modifiée.
Description de l'image: Sur fond violet où l'on aperçoit des formes de nuages, d'escaliers, d'échelles et de pluie, une personne représentée à mi-corps en blanc nous fait face, debout et un feu ardent crépite. Le foyer du feu semble partir de son ventre.
Crédit image: Vera Galindo